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Santé & Bien-être

Comment gérer l’hospitalisation d’un proche aidé

Frédéric Rein, Journaliste - ven. 01/12/2023 - 10:51
Les séjours hospitaliers font malheureusement souvent partie de la vie des proches aidants. La gériatre Elisabeth Stamm livre quelques conseils permettant d’affronter au mieux cette situation.
Les séjours hospitaliers font malheureusement souvent partie de la vie des proches aidants. La gériatre Elisabeth Stamm livre quelques conseils permettant d’affronter au mieux cette situation.
Avant d’aller à l’hôpital, il est important de parler de cet épisode à venir avec le proche aidé, d’autant plus s’il est âgé. © istock

Le quotidien d’un proche aidant n’a vraiment rien d’un long fleuve tranquille. Parfois, il est porté par un courant plus ou moins routinier, mais, à d’autres moments, il est emporté dans une succession de rapides peu agréables. Parmi les aléas redoutés, il y a les séjours à l’hôpital. «Même si ce n’est que pour un temps défini, comme le veut, par définition, toute hospitalisation, cela représente un moment particulier, tant pour la personne aidée que pour le proche aidant, atteste la gériatre Elisabeth Stamm. Et, lorsque le retour à domicile de l’aidé n’est plus possible après l’hospitalisation, c’est souvent vécu comme un échec au sein des couples âgés, car l’institutionnalisation représente un peu un coup de canif dans le contrat de mariage, par lequel on s’était promis de rester ensemble pour le meilleur comme pour le pire. C’est bien sûr faux, et il incombe au personnel soignant de déculpabiliser les proches aidants. Au CHUV, par exemple, il existe une consultation qui leur est destinée et lors de laquelle ils peuvent s’exprimer et se faire aider

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Il est important que le corps médical discute avec le proche aidant pour ne pas qu'il se sente exclu”

La gériatre Elisabeth Stamm travaille pour Hirslanden Clinique Bois-Cerf.
Elisabeth Stamm
Gériatre chez Hirslanden Clinique Bois-Cerf

Une hospitalisation nécessite un vrai lâcher prise de la part du proche aidant.

«Je me rappelle d’une dame qui avait de la peine à déléguer au personnel soignant les tâches qu’elle avait l’habitude de faire au quotidien, comme de donner à manger à son mari, se souvient-elle. C’est régulièrement le cas, surtout quand l’implication est forte. Il est donc important que le corps médical discute avec le proche aidant pour ne pas qu’il se sente exclu. »

Parfois, aussi, cela peut représenter un soulagement, notamment quand c’est l’enfant de la personne qui joue le rôle de proche aidant et qu’il doit lui-même gérer ses propres enfants, son travail et tout ce qui va avec. Comment faire dans ce cas?

«A l’hôpital, nous évaluons aussi le poids de cette charge pour le proche aidant, afin d’être sûr qu’il ne s’épuise pas, poursuit la doctoresse. Si c’est le cas, on peut, pour le soulager et lui permettre de souffler, lui proposer, après l’hospitalisation en cours, un court séjour temporaire dans un établissement médicalisé, comme un EMS. Cela se pratique d’ailleurs aussi si la personne n’est pas initialement hospitalisée. 

Dans le canton de Vaud, par exemple, les proches aidants disposent de 30 jours par an où ils peuvent demander une telle mesure, mais c’est payant (NDLR 60 francs par jours, 30 francs si on est aux prestations sociales). Le CMS et/ou le médecin traitant peut aider à faire les démarches nécessaires. On remarque que beaucoup de personnes y ont recours.»

Les hospitalisations sont des moments forts en émotions, comment les gérer au mieux?

  • Lister les pathologies principales du proche aidé, ainsi que les médicaments qu’il prend, peut s’avérer utile. Si elle est complète, la dernière ordonnance en date peut suffire, détaille la spécialiste. En revanche, pas besoin de transporter ses diverses pilules, les hôpitaux disposent de tout ce qu’il faut.

  • Préciser les éventuels régimes alimentaires ou allergies peut également être une bonne chose.

  • Prendre avec soi les moyens de mobilisation que peuvent être une canne ou un déambulateur, ainsi que les différents appareils nécessaires, comme les prothèses auditives et les lunettes.

  • Avant d’aller à l’hôpital, il est important d'en parler avec le proche aidé, d’autant plus s’il est âgé, ajoute la gériatre. Cette approche psychologique doit permettre de dissiper les peurs. On évitera toutefois d’évoquer le nombre de jours qu’il devra rester à l’hôpital, car, s’il y a une complication, cela peut générer un prolongement de l’hospitalisation, et donc une déception.

Les directives anticipées

«Ce n’est pas obligatoire, mais c’est toujours mieux d’avoir une personne désignée, afin de prendre les bonnes décisions, selon la volonté du proche aidé» Même si beaucoup d'hospitalisations se font dans l’urgence, la doctoresse Elisabeth Stamm préconise de régler en amont ce qui peut l’être.

Faut-il aussi contacter le médecin traitant?

«Ce n’est pas nécessaire, l’équipe médicale s’en chargera»

Ça, c’est la théorie. Mais, dans la pratique, l’aidant doit souvent faire face aux problèmes spécifiques de la personne qu’il soutient.

«Chaque situation est bien évidemment très différente, insiste la doctoresse. Les troubles cognitifs compliquent grandement les choses, parce qu’il est parfois compliqué pour les personnes atteintes de comprendre et de se rappeler. Ces individus ont en outre des risques accrus d’agitation. 

Et puis, il y a ceux qui ne veulent pas aller à l’hôpital et le reprochent à leur proche aidant, même si cela tient d’une vraie nécessité, notamment quand le malade se met en danger ou peine à s’orienter, et que le proche aidant a fait tout ce qui était en son pouvoir. Dans ces cas, il faut laisser le personnel soignant prendre le relais.» Ne pas refuser cette main tendue…

Si une hospitalisation est temporaire, un placement dans une institution, à l’instar d’un EMS, que ce soit directement à la suite d’une hospitalisation ou prévu de plus longue date, ne l’est pas.

Qu’est-ce que cela change pour le proche aidant?

 «C’est généralement encore plus difficile pour lui, car, comme c’est une décision qui a un impact sur le long terme, cela passe généralement par une phase de «deuil», répond la gériatre Elisabeth Stamm. 

Plus l’implication est forte, plus c’est généralement violent, les visites ne suffisant pas à combler le vide laissé. Le proche aidant doit alors quitter ce rôle pour réapprendre à devenir le conjoint ou l’enfant. Cette reprise de liberté peut, pour certains, être une délivrance, mais peut être vécue, par d’autres, comme un abandon ou un échec.» 

Et d’un point de vue administratif, comment gérer cette situation?

En demandant de l’aide. Les proches aidants ne sont pas seuls dans ces démarches, note la spécialiste. Si cela se produit à la suite d’une hospitalisation, une infirmière de liaison ou une assistante sociale peut leur venir en aide. Autrement, le médecin de famille, le CMS ou l’aide à domicile sont des acteurs vers lesquels on peut se tourner. 

Dans le canton de Vaud, par exemple, le Bureau régional d’Information et d’Orientation (BRIO) peut aider à trouver un EMS. Notez encore que la plupart des EMS demandent la rédaction de directives anticipées et, qu’en cas de troubles cognitifs, il faut identifier un curateur.»

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