La détresse des pêcheurs sénégalais en film

La pêche sur des pirogues avec des filets remontés à l’huile de coude ne fait plus le poids depuis longtemps au Sénégal, face à la pêche industrielle européenne et chinoise. © DR

Le réalisateur Marc Temmerman a traversé le Sénégal, pays connu pour son hospitalité, du Nord au Sud le long de la côte bordée par l’Océan Atlantique. Il en a ramené des images aussi belles qu’émouvantes.

Imaginez un paysan suisse qui ne pourrait pas manger ne serait-ce qu’une infime part de ses légumes pour des raisons économiques! Impossible, me direz-vous. Pourtant, c’est bien ce qui arrive à de nombreux pêcheurs, au Sénégal, contraints de vendre toutes leurs captures pour survivre. L’indigence dans cet Etat de l’Afrique de l’Ouest, peuplé de 18 millions de personnes, n’est pas une vue de l’esprit. «Oui, 40% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté», relève le réalisateur Marc Temmerman dont le film sera présenté dans le cadre d’Exploration du monde. Amoureux du pays — il le dit — le cinéaste a suivi la côte du Nord au Sud, d’abord pour évoquer la fameuse hospitalité de cette population, connue sous le nom de la Téranga. Pour autant, il n’élude pas les difficultés économiques auxquelles sont confrontés, notamment, les pêcheurs sénégalais qui représentent 15% de la population active.

>> Dates et infos sur le site d'Explorations du monde

Rien ne se perd

La pratique traditionnelle sur des pirogues avec des filets remontés à l’huile de coude ne fait plus le poids depuis longtemps face à la pêche industrielle européenne et chinoise. Les prises sont de plus en plus maigres et sont vendues dans leur quasi-totalité. Les locaux n’ont plus les moyens de manger le produit de leur travail. Et rien ne se perd, des «frontaliers guinéens» sont là pour battre les carcasses, afin d’en tirer de la farine de poisson.

Des travailleurs venus d’ailleurs qu’on retrouve généralement dans le lac Rose dont les eaux sont parmi les plus salines du monde. Jusqu’au début 2023, 60'000 tonnes de sel étaient extraites chaque année de ces eaux peu profondes. Malheureusement, de fortes inondations, en ce début d’année, ont mis en péril cette industrie et le président du pays, en personne, a demandé à des experts de trouver des solutions pour sauver ce plan d’eau unique.

Touristes rares

Et quand ça ne veut pas, ça ne veut pas. Certes, les touristes sont encore présents sur l’Île de Gorée, tristement célèbre pour avoir été le port d’embarquement des esclaves à destination de l’Amérique. Mais, plus bas sur la carte, Saly, sur la «Côte d’azur» du Sénégal, a dû faire face à la montée des eaux provoquée par le réchauffement climatique. Résultat, des plages ont disparu et des hôtels ont été contraints de fermer. Pour contrer ce phénomène, des digues ont été construites. Reste qu’à l’heure où les voyages en avion sont devenus politiquement incorrects, l’avenir de cette industrie est loin d’être gagné.

Pour autant, témoigne Marc Temmerman, la Téranga, elle, n’a pas disparu. Les Sénégalais cultivent cet art de vivre. Et trouvent leur réconfort, notamment, dans les exploits de leurs compatriotes engagés dans les plus grands clubs européens. Le ballon rond est une véritable passion, relève le réalisateur: «Au Sénégal, tout le monde joue au football.»

Jean-Marc Rapaz

 

0 Commentaire

Pour commenter