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Opinion

Et si on passait à la semaine de quatre jours de travail?

Nicolas Verdan, Journaliste - mer. 01/05/2024 - 10:03
Un livre signé Jean-Claude Rennwald, paru en mars aux Éditions de l’Atelier, relance le débat: «La semaine de 4 jours. Pour une révolution du temps.» Plaidoyer pour une semaine de 32 heures.
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La semaine de 4 jours de travail (32 heures), une idée qui fait son chemin. Mais est-elle économiquement réalisable? Débat. © iStock

 Le débat de générations du mois de mai 2024.

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Je plaide pour une semaine de 32 heures sur quatre jours”

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Jean-Claude Rennwald
Journaliste, politologue, anciennement dirigeant syndical et conseiller national (PS/JU)

La semaine de quatre jours, c’est quoi? Plus qu’un slogan dans l’air du temps?
Jean-Claude Rennwald (POUR): Ce n’est pas un slogan, mais une autre façon de voir la vie, dans laquelle le travail n’est pas tout, mais un élément parmi d’autres. C’est plus de temps pour la famille, pour le partage des tâches au sein du couple, pour la formation, pour le bénévolat, pour les loisirs, pour la culture, pour l’activité politique, syndicale et associative. Une semaine de quatre jours favoriserait l’emploi et la préservation de la santé et de l’environnement.

Une réduction du temps de travail à salaire égal, c’est illusoire, non?
Non, car les salariés seront plus efficaces, ce qui entraînera une hausse de la productivité. Mais je suis nuancé: pleine compensation pour les personnes à bas revenu, négociations pour les salaires moyens, pas de compensation pour celles et ceux qui ont les salaires les plus élevés.

La loi actuelle permettrait-elle une semaine de quatre jours?
Oui, mais à condition de travailler autant en quatre qu’en cinq jours, c’est-à-dire 45 heures selon la loi sur le travail, 40 heures selon les conventions collectives de travail (CCT) en vigueur dans l’horlogerie ou les machines. Or, les salariés syndiqués ne sont pas disposés à travailler plus de 8 heures par jour, ce qui est un acquis historique. C’est pourquoi je plaide pour une semaine de 32 heures sur quatre jours, de nombreuses expériences ayant été couronnées de succès, y compris en Suisse (fabrique de clous à Winterthour, entreprise informatique à Soleure). Cet objectif devra être atteint par les CCT plutôt que par la loi. À titre transitoire, je pourrais admettre une semaine de 36 heures sur quatre jours.

En Suisse, qu’est-ce qui coince encore pour se lancer?
Le travail est un véritable dogme. Raison pour laquelle toutes les initiatives qui visaient à réduire la durée hebdomadaire du travail ou l’augmentation du droit aux vacances ont été rejetées. Une réforme de cette ampleur nécessite une grande capacité de mobilisation et un fort taux de syndicalisation. Or, en Suisse, seuls 15% des travailleurs sont syndiqués, contre plus de 50% dans les pays nordiques.

Journées à rallonge et plus de stress, c’est la face cachée du modèle”

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Marco Taddei
Responsable romand de l’Union patronale suisse

La semaine de quatre jours payée cinq, c’est une si mauvaise idée?
Marco Taddei
(CONTRE): Une idée dans l’air du temps. À l’Union patronale suisse, nous n’avons pas d’a priori positif ou négatif contre ce modèle. Pour autant, il ne doit pas se transformer en miroir aux alouettes. Avec une condition sine qua non: ne pas en faire une généralité. La semaine de quatre jours ne doit donc ni être ancrée dans la loi, ni être imposée aux entreprises. De plus, tant l’employeur que l’employé doivent y trouver leur compte.

Pour l’employeur, quel est le frein principal?
Éviter une perte de productivité. Travailler quatre jours au lieu de cinq, pour le même salaire, implique ipso facto une réduction de productivité de 20%. Combler cette perte ne va pas de soi. Les contraintes de mise en œuvre ne doivent pas être sous-estimées. Ce n’est pas un slogan qui s’applique à toutes les entreprises sans distinction. La banque n’est pas l’industrie ou la construction.

La productivité individuelle n’augmente-t-elle pas avec le bien-être?
Un employé plus heureux au travail sera plus productif. Encore faut-il une bonne organisation, afin d’éviter une surcharge de travail. Si l’on a moins de temps pour effectuer les mêmes tâches, la semaine de quatre jours se traduira par des journées à rallonge, une augmentation des heures supplémentaires et un surcroît de stress. C’est la face cachée de ce modèle, contraire à sa finalité première. De plus, si le travail doit se faire plus rapidement, il ne faut pas non plus négliger une autre conséquence: la diminution des échanges informels entre collègues, essentiels à la productivité. Une discussion devant la machine à café peut aboutir à des idées géniales qui ne surgiraient pas forcément lors de la séance du lundi matin. 

D’autres pistes?
Le temps partiel. Cela concerne un tiers des actifs. C’est en grande partie motivé par la recherche d’un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Pour répondre à cette attente, les employeurs proposent aussi des horaires plus souples, ainsi que des aménagements permettant le télétravail.

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