Votre médecin vous a-t-il ausculté?
Comment s’est déroulée la dernière consultation chez votre médecin? Vous êtes-vous senti accueilli? Rassuré, écouté, compris? Et votre généraliste, combien de temps vous a-t-il réellement consacré? Vous a-t-il examiné, ausculté? Bref, avez-vous eu l’impression de le rencontrer?
L’ouvrage qui paraîtra à la fin de ce mois est une véritable pépite dans l’océan de publications et d’articles actuels sur la santé. Les sujets, il est vrai, ne manquent pas: l’éreintement annuel des assurés, la dislocation d’un système en fin de vie, l’essor de l’intelligence artificielle, la voracité des assurances, les promesses des médecines alternatives, et j’en passe. L’auteur de la pépite dont il est ici question s’appelle François Pilet: un médecin de famille tel qu’on en rêve souvent (n’essayez pas, il est à la retraite) et qui a décidé aujourd’hui, du haut de ses 73 ans, de nous interpeller. Nous, les patients, nous, vous, les médecins et les soignants, emportés dans ce maelström qu’on appelle le progrès, mélange d’accroissement perpétuel de nous-mêmes et de rétrécissement alarmant du lien humain.
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Fort de sa pratique en campagne, dans un village valaisan du bord du Rhône, François Pilet raconte sans forfanterie”
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Car il le raconte tout au long de ce livre: le progrès, parfois, fait aussi reculer. Que constate-t-il? Qu’un médecin qui ne vous regarde ni ne vous touche, l’œil rivé sur son écran, n’est pas promoteur de confiance. Donc de santé, donc d’espérance. Qu’un spécialiste qui veut à tout prix opérer un corps en fuite ignore l’essentiel, la voix du patient. Que la technicité et les flux administratifs qui l’accompagnent – malgré les avancées indéniables – sont aussi un danger. Les récits de ses consultations, accumulées sur 40 ans de pratique, sont denses, souvent drôles, parfois savoureux. Et parfois très tristes aussi, à l’annonce de cancers.
Fort de sa pratique en campagne, dans un village valaisan du bord du Rhône, François Pilet raconte sans forfanterie. Il décrypte cet espace singulier que le soignant crée avec son patient, que le patient crée avec le soignant, dans une histoire qui leur est désormais commune, sur plusieurs générations parfois. Il retrace les dialogues qu’il a eus avec celles et ceux qui souffraient, il parle des petits miracles, des silences, des douleurs aussi, qui, lorsqu’elles sont entendues ou simplement accueillies, perdent un peu de leur virulence.
François Pilet n’est pas un saint. Il irritera peut-être ses pairs. Mais ses convictions, ancrées dans des décennies d’expérience, résonnent profondément. Un regard, une présence, affirme-t-il, peuvent avoir plus d’impact qu’une ordonnance. Être là, pleinement, dans un monde qui nous aspire sans relâche ailleurs. S’en souvient-on suffisamment?
Bonne lecture et heureuse année à toutes et tous!