Faire sa réadaptation chez soi, c’est possible

Marianne Dutoit (à gauche) a bénéficié de l'aide de Luzia Markwalder à domicile pour se remettre d'aplomb. © Yves Leresche
Profiter du confort de sa maison et de séances intensives de physiothérapie, ergothérapie entre autres, c’est ce que proposent les Centres médico-sociaux vaudois. Reportage à Gland chez une bénéficiaire motivée.
Marianne Dutoit ouvre la porte de son appartement, situé au deuxième étage d’un petit immeuble glandois, avec le sourire. La septuagénaire nous guide ensuite d’un pas décidé jusqu’à sa salle à manger lumineuse. Difficile de croire qu’il y a quelques semaines encore, cette pétillante grand-mère de huit petits-enfants était très limitée dans ses mouvements. Victime de plusieurs chutes et autant de pertes d’équilibre, Marianne Dutoit se remet de deux fractures et également d’un covid qui lui a valu une hospitalisation, l’été dernier.
Au moment de sortir de l’hôpital, son infirmière référente du Centre médico-social (CMS) de Gland-Ville lui parle du nouveau programme de réadaptation à domicile mis au point par le dispositif de l’Association vaudoise d’aide et de soins à domicile (AVASAD) (lire ci-dessous). «Je suis une battante et, malgré ma grande fatigue post-covid, j’ai tout de suite été partante pour essayer ce programme, explique l’intéressée. Je préfère me retaper chez moi, en compagnie de mon chat et de mon mari, qu’à l’hôpital.»
Un des objectifs de Marianne était de pouvoir retourner boire le café avec ses amies. © Yves Leresche
Si le chat en question semble n’être que d’un secours moral, l’époux a en revanche été très présent et encourageant, afin de permettre à sa femme de retrouver son autonomie. «Un des objectifs, dont Madame Dutoit m’a parlé au moment de faire son bilan, était de pouvoir retourner boire le café en bas de chez elle avec ses amies de manière autonome, explique Luzia Markwalder, infirmière au CMS de Gland-Ville et en charge de ce nouveau programme. Les physiothérapeutes partenaires de la Clinique La Lignière et les ergothérapeutes qui sont venus chez elles ont donc travaillé directement dans son environnement quotidien pour lui permettre d’atteindre ce but.»
«Fière de moi»
Marianne Dutoit se souvient: «Lors de mon retour à la maison, je n’arrivais ni à faire ma toilette ni à m’habiller. Les rendez-vous avec le physiothérapeute et l’ergothérapeute chez moi ont été d’un grand secours. Pour retrouver mon équilibre, le physio a mis dans mon salon un petit tapis épais sur lequel je devais pouvoir rester debout sans bouger. Petit à petit, je suis parvenue à mieux garder la position. Il m’a aussi fait descendre et monter les escaliers de l’immeuble. J’avais peur, car je suis tombée plus d’une fois, mais, désormais, je monte tous les jours chez moi en empruntant les escaliers! Je suis fière de moi.»
Pour se sentir en sécurité, elle se déplace dehors avec un déambulateur sur roulettes. «Un jour, l’ergothérapeute m’a proposé d’aller faire une balade. J’ai donc empoigné «ma Mercedes», pensant que nous irions au bout de la rue. En fin de compte, nous avons marché presque un kilomètre à l’aller et autant au retour!»
Pour joindre le geste à la parole, la vaillante septuagénaire se lève avec détermination, met son manteau, prend son déambulateur et propose de la suivre au bistrot où elle a ses habitudes. «Vous avez vu comme je marche bien? Je retourne deux fois par semaine au café pour retrouver mes copines. Au début, à cause de ma fracture à la main, je n’arrivais pas à ouvrir mon porte-monnaie, mais je faisais confiance à la serveuse.» C’est désormais de l’histoire ancienne, car Marianne Dutoit se balade avec assurance en s’appuyant sur sa «Mercedes» qu’elle arrive à soulever sans difficulté lorsqu’il s’agit de monter et de descendre d’un trottoir. Et Luzia Markwalder de conclure: «Proposer des séances intensives de réadaptation à domicile permet vraiment de retrouver rapidement une bonne autonomie, car les progrès se font dans l’environnement réel de la personne. L’équipe de réadaptation à domicile adapte les exercices en tenant compte de ses besoins et de ses ressources sur son lieu de vie.»
Yseult Théraulaz
Un programme d’automatisation soutenu
Pendant un mois, les personnes qui adhèrent au programme de réadaptation à domicile, développé et mis en place par les CMS vaudois et basé sur le concept d’autonomisation, bénéficient d’un accompagnement sur mesure. Le bénéficiaire détermine avec les professionnels du CMS, les objectifs et les modalités d’interventions de son programme personnalisé.
C’est donc une fréquence élevée qui nécessite, au préalable, que le bénéficiaire soit motivé à suivre ce rythme. «Seuls les adultes, quel que soit leur âge, dont l’état de santé général est stable, peuvent suivre ce programme, explique Charline Champenoux, infirmière coordinatrice du programme au CMS de Gland-Ville. Il demande un réel engagement de la personne, car il faut non seulement de la volonté, mais aussi être capable de progresser dans sa réadaptation en suivant cette fréquence et cette intensité soutenues. Dès le lendemain de son retour, les rendez-vous avec les différents soignants commencent.»
La coordination des interventions et des informations entre les différents acteurs est assurée par le CMS. Ergothérapeutes, physiothérapeutes partenaires, diététiciens, auxiliaires de santé, infirmiers font partie de l’équipe qui intervient en fonction des besoins et des objectifs fixés. Les mesures d’accompagnement, les soins, les exercices, entre autres, tiennent tout de suite compte de la réalité de la personne à son domicile. «Chez les personnes âgées, il ne faut parfois pas grand-chose pour que leur santé soit affectée et que cela entrave leur quotidien, poursuit Charline Champenoux. On l’a vu avec les deux années de pandémie: beaucoup de seniors sont restés chez eux et, aujourd’hui, ils ont souvent perdu en mobilité.»
Déployé à la fin de 2022, lors d’une phase test dans les CMS de Gland (qui dépend de la Fondation La Côte) et de Sainte-Croix, le programme est en train de s’étendre aux différentes régions du canton de Vaud. (Y. T.)