Pour ou contre: faut-il une assurance dentaire obligatoire?

Plusieurs initiatives cantonales réclament son instauration. Mais les médecins dentistes ne l’entendent pas de cette oreille.
Pour répondre à la question Pour ou contre du mois d'octobre, générations s'est adressé à deux personnes ayant un avis bien tranché sur le remboursement des soins dentaires:
Théo Bregnard, député POP membre du Grand Conseil neuchâtelois et membre du comité d’initiative Soins dentaires
Dr Robin Jaquet, président de la Société neuchâteloise des Médecins dentistes
Les dentistes sont chers, non ?
Théo Bregnard: Oui, c’est cher ! Des études démontrent qu’une personne sur dix n’arrive pas à payer.
Robin Jaquet: Un cabinet est une entreprise, avec du personnel et des infrastructures. Et la qualité des soins en Suisse est en moyenne supérieure à ce que l’on trouve à l’étranger.
L’assurance dentaire obligatoire: un bien ou un mal ?
Théo Bregnard: Un bien, évidemment. Les gens sont souvent obligés de renoncer à des soins, ce qui entraîne ensuite des coûts indirects plus importants, car ils ne se font pas soigner.
Robin Jaquet: C’est une fausse bonne idée. Notre système de prévention est basé sur la responsabilité des patients. C’est moralisateur, mais cela fonctionne. Le fait de payer les soins responsabilise. Avec une assurance, tout va être dû, et on va réduire la motivation pour la pratique d’une bonne hygiène qui évite la plupart des lésions dentaires.
Faut-il craindre une explosion des coûts si elle est mise en place ?
Théo Bregnard: Je ne vois pas en quoi une assurance ferait exploser les coûts. Ils diffèrent de manière importante d’un dentiste à l’autre et nous espérons qu’une assurance permettra de mettre un peu d’ordre dans tout cela. Il faudra tenir compte de la réalité des dentistes et des besoins de la population.
Robin Jaquet: Oui. On le voit déjà avec les services sociaux où les personnes qui reçoivent des soins gratuits sont moins respectueuses de leur santé dentaire.
La santé buccale ne relève-t-elle pas d’une responsabilité individuelle et non d’une affaire d’Etat ?
Théo Bregnard: Elle relève en partie de la responsabilité individuelle, mais pas seulement. La prophylaxie est encore un peu déficitaire, il faut aller plus loin, et notamment par un véritable contrôle régulier chez le dentiste.
Robin Jaquet: L’étatisation de la médecine apporte une perte de flexibilité dans les soins et un surplus de bureaucratie chère et inutile.
Quelle autre solution verriez-vous pour aider les personnes, notamment de plus de 50 ans, qui renoncent à ces soins pour des raisons financières ?
Théo Bregnard: Nous avons pensé aux subventions pour les person-nes en difficultés et pour la prophylaxie. Mais il faut réfléchir à un changement d’optique par rapport à la santé dentaire, à envisager comme n’importe quel soin. Il s’agira d’une assurance basée sur un prélèvement paritaire au niveau des salaires. Le principe de solidarité sera évident …
Robin Jaquet: Une solution politique. Une partie de la population ne bénéficie pas d’aides, car elle est en dehors des seuils qui permettent d’en obtenir. Il faudrait une amélioration du système qui existe déjà et que d’autres pays nous envient. Les effets de seuil devraient être progressifs, permettant d’utiliser les aides existantes et de mieux les adapter
à la population.
Propos recueillis par Martine Bernier