J'hallucine

Marlyse Tschui. © Sandra Culand

Les petits écrans, la chronique de Marlyse Tschui.

Mon dos en compote ne me permet pas encore de faire du shopping. A la seule idée de passer en cabine pour essayer des vêtements, des scènes de torture assaillent mon esprit. Donc je reste chez moi, dans mes vieilles fringues, et je regarde la télé. C’est là que j’ai dérapé. Je regardais un reportage sur la mode à prix cassé dont la star est un Chinois. Sur son site, on découvre des vêtements furieusement tendance, confectionnés en Chine par des ouvriers qui travaillent dix heures par jour dans des centaines de petits ateliers. Il paraît que cette mode low cost connaît en Europe un succès fulgurant. Petit bémol, selon le reportage : des tests de qualité effectués en France montrent que les T-shirts en coton ont une fâcheuse tendance à rétrécir au lavage. La matière première de la plupart des vêtements serait le polyester, une fibre des moins chères. Mais quand même, comment font-ils?

Ma curiosité est titillée et je fonce sur mon ordinateur pour voir si cette mode est accessible en Suisse. Oui. Et j’en reste baba. Promis juré, je voulais juste jeter un coup d’œil. Vieux réflexe de journaliste… Mais je me suis prise au jeu. J’ai craqué pour trois pulls. Tout juste s’ils ne sont pas gratuits. Certes, ils ne sont pas en laine d’alpaga, mais à ce prix, même en polyester, je passe commande. On verra bien. Pour me donner bonne conscience, je me souviens que dans le reportage, les ouvriers affirmaient être heureux de coudre comme des forçats 7 jours sur 7. Comme si je ne savais pas qu’en Chine, les interviews sont contrôlées et totalement dépourvues de spontanéité! Ma mauvaise foi balaie mes scrupules.

Puis, je reçois des précisions sur l’avancée de ma commande. Et, là, j’hallucine. Un mail m’apprend que mes pulls viennent de quitter Shangaï. Deux jours plus tard, on m’informe que mon colis a atterri à l’aéroport de Zurich Kloten. Il est arrivé ce matin. Cette fois je suis submergée de honte. Vous imaginez le bilan carbone d’un tel achat? Ma fibre écolo en prend un sacré coup. Le paquet m’arrive sans étiquette de retour. Encore heureux. Aucun détail sur la composition des produits. Les pulls? Ils sont impeccables, du moins pour le moment. Mais au nom de la planète, je ne divulguerai pas le nom du site.

Marlyse Tschui

 

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