Simonetta Sommaruga, proche aidante

La conseillère fédérale Simonetta Sommaruga lors d'un entretien avec générations au printemps 2021. © Sandra Culand

L'éditorial de générations du mois de décembre 2022.

Les proches aidants — et ils sont des dizaines de milliers en Suisse — la remercieront peut-être un jour. Le 2 novembre dernier, la conseillère fédérale socialiste Simonetta Sommaruga a annoncé sa démission après douze ans consacrés, pour l’essentiel, aux intérêts des Suisses et des Suissesses et à l’avenir de notre pays au sein du monde. Lourde tâche, tâche violemment disputée aussi, en particulier ces jours, face à la guerre, à la crise énergétique et environnementale majeure qui frappe notre planète et met sous pression son département.

Après avoir géré des crises et des gens, gagné des batailles aussi, Simonetta Sommaruga, 62 ans, aurait donc pu se retirer sur la pointe des pieds et rejoindre, au nom de la sacro-sainte sphère privée helvétique, ce grand silence dont se vêtent volontiers les anciens régents fédéraux. Elle a préféré parler.  En expliquant, la gorge nouée, que son mari, l’écrivain Lukas Hartmann, avait fait un AVC et que «ses priorités» changeaient, la conseillère fédérale a fait beaucoup plus que de dire pourquoi elle partait. Elle a mis en lumière, un instant, mais avec l’audience qui est sienne, le nouveau statut qu’elle allait désormais embrasser: proche aidant.

Accomplira-t-elle, comme la plupart de ses pairs, les 50 heures hebdomadaires au chevet de son mari? Devra-t-elle lui venir en aide financièrement, administrativement?  Devra-t-elle faire sa toilette, le soutenir moralement? Sans doute un peu de tout, même si son statut et sa retraite leur conféreront un confort que tous n’ont pas. Aurait-elle fait ce choix si elle avait été un homme? Fera-t-elle avancer le statut du proche aidant ? Des dispositions et soutiens existent, mais pas encore assez.

Ce que les proches aidants pourront lui conseiller, en revanche, c’est de ne pas disparaître derrière son conjoint et d’oser réclamer de l’aide.  Pour conserver un peu d’indépendance, pour éprouver encore un rien de plaisir dans la vie et éviter qu’elle ne soit que sacrifice. Des lois ont été votées pour soutenir les proches aidants, les seconder quand il le faut. Mais ces derniers vous le diront: rien n’est plus facile que de s’enliser, à force de dévouement à plein temps, dans la fatigue, le découragement et l’isolement social. Rien n’est plus culpabilisant que d’éprouver du ras le bol. Alors, ils vous le répéteront: faîtes-vous aider pour aider sans perdre vos forces.

Nous souhaitons de tout cœur à la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga du courage et du répit. Et la remercions sincèrement d’avoir annoncé tout haut que sa priorité de vie était désormais d’accompagner la personne qui lui était la plus chère dans l’épreuve qu’elle traverse. Une manière de dire aux milliers de Suisses proches aidants que ce qu’ils font a de la valeur.

Bonne lecture et joyeux Noël à toutes et tous!

Blaise Willa,
directeur de publication
et rédacteur en chef

 

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