Une nouvelle vie pour les galets

Marina Fuchsloch et ses petits-enfants en plein atelier de peinture sur galets: un plaisir intergénérationnel. © Yves Leresche
Depuis le jour où ses deux petits-enfants ont découvert, par hasard, une pierre décorée d’une tulipe, Marina Fuchsloch s’est lancée avec eux dans une merveilleuse activité ludique et créatrice.
Tout commence au printemps dernier, à l’occasion d’une sortie d’anniversaire. Marina Fuchsloch, de Plan-les-Ouates (GE), se balade sur les quais de Morges (VD) en compagnie de ses deux petits-enfants, lorsqu’elle les voit soudain courir dans sa direction, tout excités par une découverte insolite: «Ma petite-fille Mélibée a trouvé au pied d’un arbre un joli galet décoré d’une tulipe bleue.»
Intriguée par ce dessin, elle s’interroge avec sa grand-maman, tandis que son frère Célian signale un message au revers de la pierre: «Poste ma photo sur galetromandie.ch et fais-moi voyager.» Un mot en bleu précise le contexte: «Facebook» (groupe pour les membres, ndlr).
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De retour chez elle, Marina Fuchsloch rejoint ce groupe via le réseau social. Par ses soins, le galet à la tulipe se retrouve en photo sur la page de «Galet Romandie». La personne à l’origine de cette peinture sur pierre se manifeste. «Elle a reconnu son œuvre sur la page Facebook, explique Marina Fuchsloch. Voir que son galet a voyagé crée de l’émulation et du plaisir!»
Une coquette jeune femme... © Yves Leresche
Un jeu créatif
Amusés, la grand-maman genevoise et ses deux petits-enfants se prennent au jeu. A leur tour, ils récoltent des galets qu’ils décorent, avant de les semer ici ou là, au gré de leurs promenades ou excursions. Leur démarche s’inscrit dans les principes de «Galet Romandie», tels que précisés par Céline Elmiger, administratrice du groupe Facebook. «En balade, ramassez des galets ou des pierres qui vous plaisent. Décorez-les et reposez-les pour égayer les balades des autres gens... ou les vôtres. Joli jeu à faire avec petits et grands. Le but est aussi que les personnes qui les ont peints puissent suivre leur voyage sur le groupe…»
... un petit chat craintif... © Yves Leresche
Depuis qu’elle s’est lancée dans cette aventure, Marina Fuchsloch, 72 ans, musicienne licenciée en rythmique Jaques-Dalcroze, trouve un bel équilibre entre créativité et plein-air: «J’ai déjà déposé une dizaine de galets et quatre photos sont apparues sur le site. Je choisis des lieux visibles, comme le bord d’une fontaine, sur un vieux mur, près d’un cimetière...»
Stimulation intergénérationnelle
Le partage intergénérationnel compte aussi beaucoup dans ce hobby qui passionne également ses deux petits-enfants: «Je ne suis pas très douée en peinture. Mais, à travers cette activité, en tant que grand-maman, je leur transmets avec plaisir une ouverture à la nouveauté, à la créativité, un esprit de curiosité. C’est aussi une façon de laisser vivre l’enfant qui est en moi, et... ça me maintient "jeune"!»
... un fier goupil... © Yves Leresche
Peu coûteuse, cette activité exige un minimum de matériel: de l’acrylique pour faire le fond et des stylos-marqueurs. Pour terminer, on spraye un vernis transparent.
Stimulantes, vivantes, ces rencontres dynamiques autour des galets sont aussi l’occasion de partir en balade en famille (la chasse), tout en exprimant sa personnalité (la décoration). «A priori, je ne sais pas toujours ce que je vais peindre. Je cherche parfois mes sources d’inspiration sur Internet. Ma petite-fille a, par exemple, trouvé un galet peint en deux couleurs. Elle s’en est inspirée pour recréer l’écusson du canton de Genève. Et, au lieu de faire l’aigle, elle fait un moineau et une clé de Yale à la place de la clé dorée. C’est typiquement elle.»
... ou un moineau sur fond de blason, tout est permis! © Yves Leresche
Au hasard des trouvailles, Marina Fuchsloch est tombée sur des galets porteurs de maximes ou de proverbes. Parfois, elle a un pincement au cœur quand vient l’heure de se séparer de l’une ou l’autre de ses créations: «On peut éprouver une forme d’attachement. Ce ne sont pas des chefs-d’œuvre, mais dès lors qu’on y médite et qu’on y passe du temps, c’est plus difficile de les confier au hasard...»
Réunissant désormais plusieurs milliers d’adeptes (plus de 3000 rien que sur le groupe FB Galet Romandie), il semble que ce véritable phénomène soit né au Royaume-Uni sous l’appellation «Love on the rocks», littéralement «L’amour sur les pierres». En France, le groupe «Trouve mon galet» fait des émules, eux aussi toujours plus nombreux. A Genève, le canton où vivent Marina et ses petits-enfants, les galets n’ont pas de frontière. Peu importe leur adresse de publication sur le Net. Pour peu qu’ils croisent le chemin d’un Petit Poucet, ils sont susceptibles de faire le tour du monde...
Nicolas Verdan